Elégante, délicate, elle avance, le port de tête altier, la démarche serrée en petits pas claquants de ses sandales de bois. A sa taille, la large ceinture savante minutieusement nouée ceint son kimono de soie précieuse aux motifs chatoyants. Lorsqu’elle danse en une gestuelle minimaliste et sans artifice, ses manches larges tombent de ses avant-bras, laissant parfois apparaître ses mains qui se meuvent en gestes lents et saccadés comme de petits oiseaux affolés. Il émane d’elle tout un mystère trouble et gracieux.
Les traits du visage, constants sous les cheveux noirs gonflés en chignon savamment élaboré, orné de délicats peignes à breloques, semblent à jamais immobiles. Les yeux intenses semblent regarder en dedans d’elle, un regard fixe et contenu, rehaussé de sourcils foncés hauts et droits, inexpressifs. La bouche écarlate ne forme qu’un petit point rouge en une moue incomplète, au dessus de laquelle on devine l’ombre pâle de la lèvre supérieure. La peau a pris la blancheur crayeuse de la poudre de riz qu’elle a appliquée en fard épais sur son visage. Seul un rectangle de chair a gardé sa couleur originelle, sa texture veloutée et précieuse, depuis la racine des cheveux jusqu’à l’encolure blanche de son kimono. A peine visible, subtile et énigmatique, comme inaccessible, la peau laissée nue de la geisha.