Dans cette lumière de fin de journée qui redessine les contours telle une scène de théâtre naturelle, les danseurs de la mer se produisent tous les soirs.
Les spectateurs affluent sur la plage, en silence. Les chiens viennent se mettre à leurs pieds, fidèles au poste. Les corbeaux tournoient au dessus de leurs têtes en attendant l’arrivée des filets. La barque au loin supervise le spectacle. La montée du chalut.
Les artistes, les voilà, ce sont les pêcheurs qui viennent remonter lentement les filets dans une chorégraphie mesurée, vieille de mille ans, qui s’imprime à chacun de leur pas dans le sable. Pour se donner du cœur à l’ouvrage, ils scandent une litanie monocorde et presque inaudible. D’un mouvement synchronisé, en appui sur une jambe, les hanches coincées sur la corde, un nœud à la ceinture, ils se lancent en arrière, les muscles tendus, en résistance. A petits pas, ils semblent piétiner, à petits pas, imperceptiblement, ils remontent sur la plage. Devant, derrière, celui qui est dernier passe le premier et vient saisir la corde au plus près, et la danse se poursuit, à petits pas cadencés. Le chalut s’approche lentement du rivage, tiré par la force unie des pêcheurs et leur rythme lent.