(du 11 janvier au 5 février 2016)
Un pays continent, c’est grand !
Dans la planification de notre programme, l’Australie s’est vite avérée être un problème… de taille ! Et puis, je dois l’avouer, je n’ai jamais été attirée par ce pays, donc pour moi, on ne devait qu’y passer, comme c’est sur notre route, ce serait dommage de ne pas s’y arrêter. Mais sincèrement, on fait ca vite fait bien fait et on n’en parle plus. Il faut donc choisir quoi faire, une fois arrivés dans un pays de la taille de l’Europe toute entière, rappelons-le. Uluru ? La grande barrière de corail ? Canberra ou Melbourne ? Nous avons reçu plusieurs avis mais n’arrivons pas à nous décider. Nous aurions pu presque tirer à pile ou face mais ce qui a fait pencher la balance pour nous, c’est essentiellement les distances : Ayers rock est déclaré définitivement hors jeu en raison de sa situation géographique, loin de tout. La saison n’est pas idéale pour la côte des surfeurs, la côte est au nord de Sydney, et en plus, il y a des méduses mortelles dans l’eau. Le concept ne nous parait pas très attrayant avec des enfants qui ne rêvent que de mettre les pieds dans l’eau. Faire la route de Sydney jusqu’à Cairns puis redescendre par Brisbane et Byron bay, étapes incontournables, sur un parcours de plus de 5000 km ne nous attire guère après un road trip de 26 jours avec de très longues distances, nous préférons un itinéraire plus relax.
Alors ce sera la Great Ocean road. Depuis Sydney, via Canberra puis Melbourne, nous passerons sept jours sur la côte Victorienne, avant de remonter sur Sydney en longeant la côte sud-est en quatre jours. C’est serré mais ça tient dans les cases. Et puis… A mi-parcours de la Great Ocean Road, nous décidons de reculer notre vol pour les Philippines pour passer quelques jours de plus en Australie. Le prochain vol est le 5 au lieu du 1er, nous voici avec 4 jours de rab, nous pouvons ainsi moins nous presser sur la route du retour à Melbourne et profiter de Sydney.
Sydney l’enchanteresse
Sydney nous tape dans l’œil ! En général, c’est rare que les grandes villes me fassent de l’effet, mais là, je dois dire que je tombe sous le charme de cette belle ingénue, vieille de seulement 200 ans. Habillée par la mer d’une robe bleue à volants blancs, Sydney a des airs de jeune fille anglaise, un charme à l’ancienne, les joues roses et l’œil mutin. A ma plus grande surprise, je suis conquise.
Nous arrivons à Sydney au petit matin. Il y fait chaud et ça nous fait du bien. Nous partons nous installer dans notre maisonnette située à Randwick, tout près de Coogee beach. Déjà, c’est le gros coup de cœur ! Le quartier est calme, résidentiel et très couleur locale, avec ses petites maisons de brique au charme rétro et aux jardinets débordants de plantes exotiques. Nous allons déjeuner dans le quartier de Coogee, où les cafés bobos nous font de l’œil. La plage qui s’étend en contrebas au pied du quartier, relax et conviviale, semble nous attendre, les bras tendus.
Nous faisons les touristes les jours suivants, direction le cœur névralgique de la ville pour tout visiteur qui se respecte. Nous commençons par le Sydney Opera House, toutes voiles dehors, blanc sur sa page bleue. L’histoire bien triste de cet architecte danois, Jørn Oberg Utzon, qui fut éjecté du chantier en 65 et ne revint jamais en Australie pour admirer son œuvre achevée, ne change rien à la splendeur de ce bâtiment voguant dans une brise paisible. Nous retournons plusieurs fois sur l’esplanade de l’opéra où bat le cœur de la petite Anglaise, juste pour le plaisir et la vue. Nous longeons Circular Quay qui relie l’esplanade de l’opéra à Harbour bridge, l’autre emblème mythique de la ville, ce grand pont suspendu avec sa forme arrondie jetée au dessus de l’eau. Les symboles de la ville ont respectivement 42 ans et 84 ans.
Nous arpentons les jardins botaniques derrière l’opéra. Nous parcourons les rues de la city ou de timides pubs et de grandes tours de verre cohabitent. Nous déambulons le long de Circular Quay. Il n’y a rien d’étouffant ici, que de bonnes ondes et l’envie irrépressible de perdre ses pas dans cette ville bégueule pour deux sous.
Côté plage, nous profitons de celle de Coogee, et si nous faisons un saut sur la mythique Bondi, nous gardons un faible pour sa petite sœur. D’autant plus que le jour ou nous allons voir Bondi, il y souffle un vent à défriser un surfeur australien, et dans l’eau, on y trouve presque plus de planches que d’humains ! Lucie se fait une belle frayeur avec une vague qui lui fait boire la tasse et perdre pied. Elle ressort en jurant que l’on n’y reprendra plus.
Durant ces premiers jours, nous partons également en dehors de la ville découvrir les belles Blue Mountains, noyées dans un océan d’eucalyptus, ces arbres au tronc qui pèle et dont les feuilles exhalent une vapeur bleutée. La forêt baigne des falaises rouges comme des écorchures, aux dénivelés impressionnants. Nous faisons halte aux 3 sœurs, 3 pics rocheux autrefois femmes d’après la légende, et nous descendons les Furber steps, 800 marches qui nous coulent au fond de la vallée dans un dédale de végétation touffue où l’on découvre les vestiges d’une mine. La remontée s’effectue à bord d’une petite chenille digne des plus terrifiantes montagnes russes de foire, on se retrouve quasiment à la verticale, face au vide, même les enfants ont flippé, c’est dire !
Puis nous nous lançons dans la première étape de notre voyage : Sydney – Melbourne, via Canberra. 8 heures de route sur un long ruban goudronné où foncent des train trucks, longs et lourds. L’autoroute file, droite et morne, bordée de longues plaines ondulantes jaunies par le soleil et malheureusement par une quantité effroyable de kangourous écrasés. Nous consacrons une demi-journée à la capitale, Canberra, qui en mérite certainement un peu plus. Froide et lisse, Canberra possède cette architecture millimétrée, faite d’angles droits et de lignes de perspective qui lui donnent un air austère. La ville est récente, elle fut nommée capitale en 1908, mettant ainsi fin à la guéguerre entre Melbourne et Sydney qui s’écharpaient pour le titre de première ville d’Australie.
Nous nous rendons à la National Art Gallery, qui de notre point de vue est un incontournable. Art aborigène, collections anciennes et art contemporain se côtoient dans un grand bâtiment moderne labyrinthique, riche et dense. Nous croisons également nos premiers kangourous dans le parc Weston. Pas farouches, ils se tiennent à l’ombre des arbres, et se laissent approcher, jusqu’à ce que pris d’un doute, ils s’enfuient en sautant gracieusement pour se mettre à l’abri.
Great road trip sur la Great Road
La Great Ocean Road, c’est 200 kms de route qui longent la côte dans l’état de Victoria, au sud de Melbourne. Plages et falaises, petites stations balnéaires et forêts majestueuses d’eucalyptus peuplés de koalas et de kangourous nous attendent.
Nous commençons par Queenscliff. L’office du tourisme est tenu par des volontaires comme partout en Australie, de gentilles mamies qui nous proposent mille activités et visites. Leurs petits enfants ne doivent pas s’ennuyer ! Nous marquons un arrêt au point Addis, avec son joli phare surplombant la mer.
La charmante Lorne est notre première véritable étape. Une jolie plage nous y attend, nous faisons connaissance avec les drapeaux rouge et jaune qui autorisent la baignade. Nous comprenons vite pourquoi, les vagues sont fortes et les courants de fond vous attirent et vous retournent en moins de temps qu’il ne faut pour le dire. Nous logeons dans un guesthouse dont le jardin, à l’ombre des eucalyptus, abrite des cacatoès au chant cassé qui viennent petit déjeuner avec nous et voler les tartines d’Anatole. Nous sommes sous le charme. Au Teddy’s lookout, nous admirons le point de vue au-dessus de la ville, la mer translucide aux reflets émeraude et la côte qui s’effrite dans le sable. Plus dans les terres, aux Erskine falls, au cœur de la forêt de gum trees, je suis subjuguée par ces arbres longs et immenses, droits comme des lances blanches, au feuillage léger qui laisse passer la lumière en douces brèches claires. De retour sur la côte, nous profitons de la plage et du rythme lent de cette journée. Nous nous lançons dans la construction d’un vaste château-fort-piscine que nous regardons disparaitre dans la mer. Nous finissons la soirée devant un fish n’chips délicieux, face à la mer. Nous trouvons des pelles, des seaux et même un tracteur en plastique du plus bel effet, abandonnés sur la plage. Et puis le long de la plage, sur le parking, entre deux poubelles, deux bodyboards, plus tellement de première jeunesse mais encore tout à fait utilisables nous tendent les bras. Après une vague hésitation (remarquez le jeu de mot !), elles finissent elles aussi dans le coffre de la voiture. Ce sera l’éclate dans les vagues les jours suivants pour nos loulous, de vrais petits surfeurs !
L’étape suivante, c’est une autre station balnéaire, Apollo Bay, sa grande et belle plage de sable fin protégée par la dune, son petit port et un arrière pays vallonné et verdoyant. La route entre les deux villes, coincée entre mer et forêt, magnifiquement escarpée et virevoltante, d’autant plus intéressante que nous la suivons sous un ciel chargé et changeant dévoile à chaque virage une autre plage de rochers noirs déchiquetés, une autre anse de sable jaune aux vagues chargées d’écume, une autre crique aux galets empilés à Wongarra. Le feu a fait des ravages sur cette portion de route, ça donne des couleurs automnales anormales pour la saison. Quand on ouvre les fenêtres de la voiture, on sent l’odeur acre de la cendre. La semaine dernière, la route était fermée. Combien de temps avant que la nature reprenne ses droits et redonne à cette portion de route toute sa grâce ?
Nous faisons une halte à Kenneth River à la rencontre des koalas. Le coin est connu pour en abriter quelques-uns non loin de la route. Et les voilà, comme de grosses peluches douces, pendus paisiblement aux arbres, ils semblent totalement indifférents à notre présence amusée. Nous en voyons trois mais sommes interrompus par la pluie ce jour-là.
A Apollo Bay, les jours se ressemblent. Le beau temps fait du yoyo, le matin est chagrin, et l’après-midi baigne ses longues heures dans les rayons chauds d’un soleil ardent, temps quasiment normand, changeant et humide, mais le soleil a vite fait de réchauffer tout cela. Nous adoptons un rythme efficace : école le matin alors qu’il pleut et dès que le soleil pointe son nez, tout le monde à la baille !
Nous reprenons la route pour atteindre le joli Port Campbell, petit port abrité dans sa crique. Les formations rocheuses situées le long de la côte de part et d’autre constituent le vrai clou du spectacle de cette Great Ocean road. Des falaises, des formations calcaires appelées « stacks », des gorges creusées par la mer, des grottes, des arches… Nous ne nous lassons pas d’admirer sous toutes les coutures les douze apôtres aux silhouettes taillées par les derniers rayons de soleil, nous dégringolons les Gibson’s steps pour tomber à leurs pieds sur une longue plage. A Loch Ard Gorge, nous regardons la mer pénétrer à grand fracas dans la gorge maritime étriquée. Nous regardons le London bridge à l’équilibre précaire, nous passons la bay of martyrs, puis la bay of islands, l’œuvre incroyable de la nature, la force des éléments, et la beauté brute. Tant d’étapes que l’on admire en s’exclamant « oooooooooooh c’est beauuuuuuuuuuuuuuuuuuuuu ! ».
Port Campbell marque la fin de la Great Ocean Road pour nous. Nous devons rebrousser chemin et repartir en direction de Melbourne , en nous arrêtant cette fois-ci aux étapes que nous avons sautées à l’aller.
Tout d’abord, Cape Otway nous attend au bout d’une longue route perdue dans la forêt d’eucalyptus aux feuilles oblongues et à la luminosité si particulière. Avant de l’atteindre nous piqueniquons sur la magnifique Johanna Beach, au tumulte impressionnant mais placide, tapage de vagues incessant. Nous y apercevons des koalas immobiles, leur présence tranquille, leurs airs de nounours placides aux grandes oreilles nous enchante. Au bout de cette route, le phare de Cape Otway, l’un des plus anciens d’Australie (1848). A cette époque, sans la route, le gardien du phare et sa famille n’était ravitaillé que 2 fois par an, par bateau. Isolement total. Nous le vivrons le temps d’une nuit, car nous séjournons dans la maison du gardien, reconvertie en bed and breakfast de charme au parquet qui craque. Et le charme, le lieu n’en manque pas ! les maisons ont gardé leur allure austère, et le phare, tout blanc, dressé aux quatre vents, fait face à la mer et à la vue splendide, veille la côte de sa lueur, embrasse le large.
Nous visitons le phare, et observons un bel exemple de lentille de Fresnel, grand prisme de verre qui intensifie le rai de lumière nécessaire pour que les bateaux puissent voir le phare du plus loin possible. Je pense au dernier gardien de phare, qui a vécu 30 ans ici sans qu’une seule fois la lumière du phare ne s’éteigne. Il est difficile d’imaginer l’ingratitude de cette vie passée à sauver des vies sans le savoir, à ne pas pouvoir mesurer l’importance du travail effectué…
Le plaisir de jouir du lieu après le départ des touristes est immense. Nous profitons de la sérénité et du calme dans un long crépuscule et un walibi vient même nous rendre visite en sautillant, pépère.
Le calme du lieu nous gagne, c’est paisible et reposant, même si a priori l’endroit est peuplé de fantômes, je serais presque prête à signer pour une carrière de gardien de phare.
Après avoir quitté la quiétude du phare, nous remontons ensuite sur Torquay, la Mecque des surfeurs, pour faire un saut à l’amusant petit musée du surf, qui comme tout sport, devient une affaire sérieuse dès que l’on s’y intéresse de près, et pour faire un saut sur la mythique Bells beach où les surfeurs chevronnés viennent s’essayer sur les vagues. Le temps se gâte, ne nous laissera pas le loisir de profiter encore un peu de l’océan, il est temps de rejoindre Melbourne.
La Great Ocean Road est une très belle étape australienne, loin des clichés des plages bondées de surfeurs bodybuildés. Alors, c’est vrai qu’on n’a pas opté pour la grande barrière de corail ou l’outback plus typique, mais sans regret. Les villes australiennes ont su nous amadouer pour leur côté dynamique et relax. La côte sauvage offre au regard une multitude de richesses géologiques, d’innombrables points de vue entre mer et terre, des plages sauvages et absolument tranquilles et d’agréables stations balnéaires à taille humaine. C’est un circuit qui convient parfaitement aux familles, puisque les étapes sont courtes et, entre les animaux et les jolies plages propices à la baignade, les haltes sont nombreuses sur le chemin. Le temps variable ne change rien au charme incroyable des lieux et même leur ajoute un petit supplément de beauté sauvage qui ne saurait nuire. Et si les stations balnéaires pourraient parfois manquer d’âme et de présence, elles offrent toujours un petit café ou une jolie table ou s’installer pour juste profiter. Pour le reste, les éléments s’expriment dans leur plus simple appareil, la mer, le ciel et l’air combinent leurs forces en un tableau tout le temps nouveau, toujours grandiose, qui restera longtemps gravé dans nos têtes.