A chaque fois que l’on quitte un pays, j’ai cette petite manie de lui faire mes adieux. Je me laisse envahir par toutes les sensations. Je pose un dernier regard plein sur ce qui m’entoure. J’écoute une dernière fois, attentivement, les bruits de la ville. Je hume l’air chargé d’odeurs. Je sens mes mains moites, la sueur sur mon front, le vent sur ma nuque. Je dis au revoir, dans un murmure ou à voix haute, je veux m’entendre le dire. Dernière conscience lucide et posée avant le départ, c’est un au revoir que je m’adresse pour m’être sentie vivante dans ces lieux, dans ce pays, parmi ces gens. Je garde ainsi un souvenir ardent de l’escale que je laisse derrière moi.
Et de ces sensations, je me crée une image que je pourrai évoquer à l’envi une fois rentrée, une image polie comme un joli galet ramassé sur la plage, une carte postale oubliée au fond du sac, une boite de couleurs dont on sort de temps en temps l’un des pastels à la teinte vibrante. C’est comme une superstition, une petite prière, un moyen de remercier la multitude, la variété du monde. C’est ma façon à moi de retenir l’essence du voyage, de me façonner un souvenir que je pourrai chérir avec délicatesse dans les heures mornes et interminables du retour.